Photographies de Roms à Genève
Né en 1972, le photographe genevois d’origine française Eric Roset est tombé sous le charme des Tsiganes «en lisant des romans de Prosper Mérimée en découvrant les films baroques d’Emir Kusturica». En 1998, un voyage le conduit au pays des vampires. Premières rencontres avec des Roms. Et premier choc, provoqué par le racisme qui frappe cette communauté de deux millions de personnes.
L’hiver suivant, ce photographe autodidacte réalise des images aux environs de la ville de Brasov, sur un croisement où des enfants roms mendient. Le sujet motivera une dizaine de déplacements en Roumanie et débouchera sur « Opre Roma! Debout les Roms!;», titre d’une première exposition montée à Genève, Paris et Marseille, notamment. En France et en Suisse, Eric Roset photographie des Gens du voyage: Manouches, Gitans, Jensich.
Un jour alors qu’il voyage en France, Eric fait la rencontre d’un petit groupe de Roms. Ces voyageurs fauchés viennent de la petite ville d’Aiud, en Transylvanie, et sont en route vers … Genève. Ils tireront de l’argent de cette ville à travers la mendicité, vivant sans toit, ni chauffage, ni eau. Puis feront venir ici d’autres membres de leur communauté.
Eric Roset prend naturellement langue avec ces Européens qui dorment sous des ponts. Ses images montrent la mendicité, mais aussi les retrouvailles et les moment de détente des Roms, durant la journée et le soir, en différents lieux de Genève. Il photographie les repas, le dormir, le jeu et la fête. Et capte un peu de ce grain de folie qu’il y a chez les Tsiganes et qui fascine tant certains Gadjé. «Les Roms ne sont pas seulement des mendiants», insiste Eric Roset.
On retrouve aussi dans l’objectif de ce photographe instinctif les regards de passants confrontés à la mendicité. Ceux-ci montrent assez que la proximité physique avec ce geste, désespéré, n’est jamais aisée. C’est d’ailleurs cette difficulté qui va entraîner le départ des Roms et non la criminalité – la police n’accuse pas les Roms de voler – ou l’existence de prétendus «réseaux».
Mi-novembre, les autorités genevoises ont activé leur plan de lutte contre la mendicité. Eric Roset assiste à l’évacuation de deux campements tsiganes, sujet qu’il a d’ailleurs déjà couvert à Paris. «On aurait pu leur permettre de se loger et, mieux encore, les autoriser à travailler», dit-il. Le séjour des Roms à Genève aura donc «permis à des familles d’améliorer leurs conditions de vie au pays … mais au prix d’une vie passée dans des conditions indignes». Ainsi conclut Eric Roset, qui est aussi membre de l’association genevoise Mesemrom, soit littéralement, «je suis un Homme».
Stéphane Herzog.